Carnet de route

Recyclage Terrain d'Aventure organisé par le Comité Régional Bourgogne Franche-C

Le 14/07/2022 par Sabine Vaillant

Du 14 au 17 juillet au refuge de la Dent d’Oche 
 

Ma formation Terrain d’Aventure arrivant à échéance (déjà 6 années ont passé !), je me suis enquise fin 2021 auprès de Philippe Croissant (notre dévoué Délégué Technique Territorial Alpinisme) pour trouver un recyclage. J’ai eu beaucoup de chance car Philippe avait justement prévu d’organiser une formation Terrain d’Aventure UV1+UV2 l’été suivant, et m’a proposé d’y participer pour me recycler. 

La formation devait se dérouler pendant le pont du 14 juillet avec pour camp de base le refuge de la Dent d’Oche. 
Le planning s’est révélé plus compliqué que prévu car j’ai quitté la région à la mi-mai pour m’installer à Nîmes où j’ai démarré une nouvelle vie avec un nouveau travail. Le printemps ayant été maussade, je m’étais peu entraînée. Quand il s’est enfin décidé à faire beau, j’avais la tête dans les cartons… 
Je me suis donc entraînée comme j’ai pu pour n’être pas trop à la ramasse. J’ai découvert le très beau mur du gymnase de Bouillargues, et ai tant bien que mal réussi à grimper deux ou trois fois en extérieur. Il n’est pas évident d’arriver dans un club quand ça sent la fin de l’année et que l’on n’a pas accès aux circuits de diffusion d’information. 
10 jours avant le début du stage, Philippe m’a contactée pour m’annoncer un gros coup dur. Un de ses orteils a été broyé lors d’une chute de pierre et l’os des phalanges a été pulvérisé. Il ne sait pas quand ni comment il pourra remarcher. 
Je m’attendais à ce qu’il m’annonce naturellement que le stage soit annulé. Quelle ne fut pas ma surprise qu’il nous propose à moi et Alika (les deux personnes du groupe inscrites pour un recyclage) d’assurer l’intérim en son absence. Belle surprise car sa confiance m’honore, mais je sens instantanément un petit poids sur mes épaules. Oh, juste un élément de plus en parallèle de l’apprentissage d’un nouveau travail, et de l’adaptation à un nouvel environnement, nouveau lieu de vie, nouveau club… 
Philippe organise une réunion zoom avec Benjamin, notre guide, et nous sommes tous les quatre d’accord pour continuer le projet. Alika s’occupe de l’administratif et du refuge, Benjamin recherche un site dans la vallée pour les manips du premier jour, et j’essaie tant bien que mal de compiler les informations pour le rendez-vous du premier jour pour les envoyer à tout le monde. 

J’ai pu obtenir facilement une RTT pour le jeudi 15 (pont employeur) mais vu la distance Nîmes-Dent d’Oche, j’ai fini par demander 2 demi-journées supplémentaires, qui m’ont heureusement été accordées sans aucune difficulté (ouf). 
Je pars de Nîmes le 13 juillet à 14h avec un gros sac rempli de matériel, et un plus petit que je prendrai pour grimper. J’avais initialement envisagé de prendre de l’eau pour plusieurs jours car il n’y en a pas au refuge, mais le poids global du sac m’en a découragée. J’ai compris que la fin de l’ascension menant au refuge était un peu athlétique, et il me faudra être capable de monter ce sac jusqu’en haut. Il y a quand même plusieurs bonnes nouvelles : nous avons finalement rendez-vous dans la vallée et non pas au refuge (le réveil sera moins matinal), et je n’aurai pas besoin de monter les pique-niques du midi car ils seront fournis par le refuge. Le sac sera donc un peu moins lourd. 

Sur l’autoroute A7 vers Montélimar, je rencontre un gros bouchon. Il y a de la fumée un peu plus loin. Au moment où je m’approche de la source de la fumée, je vois un gros brasier qui s’amorce. Un camion qui transportait des sacs d’une matière pulvérulente est en train de s’embraser et la poudre s’écoule des sacs en brûlant instantanément. Ce serait presque beau si ce n’était aussi tragique. Le feu s’est déjà propagé sur les bas-côtés hors de l’autoroute. Quel été sinistre. Il y a tous les jours de nouveaux départs de feu dans l’arc méditerranéen… 
Après une nuit au Formule 1 de Thonon Les Bains, je me dirige le lendemain vers le lieu de rendez-vous, au parking « Le sauvage » vers Abondance. Tout le monde arrive peu à peu : Jérôme, Adrien, Frédéric, Joseph, Cécile, Clément, Benjamin et Alika. 
Après avoir fait connaissance et s’être tous présentés mutuellement, nous nous dirigeons vers la falaise pour réviser et améliorer nos connaissances sur le matériel et les techniques de progression en terrain d’aventure. Les binômes définis par Philippe ont bien travaillé en amont et ont tous préparé consciencieusement leurs exposés et démonstrations. Les exposants ont du mérite car c’est la canicule généralisée ce week-end et, si l’auditoire parvient tant bien que mal à trouver un peu d’ombre de-ci de-là, les démonstrations se font par contre au soleil sous une chaleur écrasante. 

Il est temps de songer à nous replier vers notre camp de base. Une belle montée nous attend, avec de gros sacs en plein soleil, et une fin un peu raide, avant de parvenir au refuge. La récompense est le passage par les chalets d’Oche et la source d’eau fraîche qui s’y trouve. Dernière possibilité de faire le plein et de se rafraîchir, car il n’y aura pas d’eau là-haut, à part un bidon de récupération des eaux pluviales à l’allure douteuse à force que tout un chacun s’y lave les mains ou y trempe diverses choses à nettoyer… 
Quasiment tout le monde a opté pour la stratégie des 2 sacs : un gros pour monter le matériel et un petit pour les courses à la journée. Dans la dernière partie de l’ascension avec le petit passage où il faut poser légèrement les mains, nous nous sentons un peu encombrés, mais cela passe quand même très bien. 
Une fois au refuge, l’équipe des gardiens nous dépeint un tableau peu réjouissant au sujet des courses que nous avions prévu de faire. Le terrain est instable, et il est préférable de limiter le nombre des participants. Nous allons donc devoir nous séparer en deux groupes tous les jours, en espérant n’être encore pas trop nombreux sur place. 
Après pas mal d’hésitations et de changement d’avis, comme nous avons la primeur de choisir avec Alika, nous décidons d’aller tester la voie Ravanel en face Nord avec très peu de marche d’approche et une sortie au sommet donc à proximité du refuge. Le second groupe ira donc au pilier Ouest faire Canicula la bien nommée (longue marche d’approche, escalade au soleil pour la partie course d’arête, et de nouveau la montée au refuge avec sa partie terminale escarpée). Il nous faudra bien en profiter, parce que le lendemain ce sera l’opposé. 
Le refuge est plutôt rempli ; ce qui fait que l’on passe son temps à se gêner dans la salle de stockage du matériel, dans le réfectoire, dans l’escalier montant aux dortoirs, sur le balcon menant à la queue pour les (enfin l’unique) toilettes et à la terrasse… Mais les gardiens sont extrêmement sympathiques, conviviaux et aux petits soins, avec de très bons plats. De plus, la vue imprenable sur le Léman et le Jura derrière au soleil couchant, les nombreux bébés bouquetins qui viennent brouter à proximité du refuge valent largement le détour et font oublier l’absence d’eau et la promiscuité. 
Après une nuit fort appréciée, je retrouve de bon matin plusieurs personnes de notre groupe à l’extérieur qui apprécient la vue, photographient les bébés bouquetins peu farouches, lisent ou se ressourcent sur le balcon. Ça fait vraiment longtemps que je ne suis pas allée en refuge l’été et j’avoue que j’apprécie pleinement ce moment privilégié avec la vue, le calme, l’immensité, et la fraîcheur du matin qui contraste avec la canicule nîmoise…. 
Nous partons du refuge vers 8h. Le second groupe part d’un bon train car sa journée sera longue. Nous avons du mal à les suivre et les laissons finalement prendre de l’avance. La difficulté pour nous ne sera pas la distance, mais la recherche d’itinéraire et les protections à poser dans cette voie typée « ancienne » sur un terrain propice à la chute de pierres. Nous ne nous sommes pas donné d’horaire et aviserons sur place. 
Nous trouvons sans difficulté le départ de la voie. La photo accompagnant le topo nous a bien facilité la tâche. Je suis encordée avec Adrien, et Alika l’est avec Joseph. Je me lance dans la première longueur qui donne vite l’ambiance. Le premier pas est patiné, poussiéreux et un peu morpho. Je me demande presque si je vais passer, comme ça, à froid. Un de mes genoux vient à ma rescousse et heureusement, le reste de la longueur est beaucoup plus facile. Je m’aperçois rapidement que le plus facile s’accompagne d’une infinité de petits cailloux instables qui ne demandent qu’à rouler vers le bas. Il va falloir être extrêmement prudente. Pour éviter les cailloux, je me retrouve régulièrement hors des fissures et aspérités sur des “mini” arêtes assez lisses et rondes. Il n’y a pas la possibilité de protéger, mais l’escalade ne présente heureusement aucune difficulté. Je trouve deux pitons qui signalent l’arrivée au relais. Adrien me rejoint talonné par Joseph, et nous nous retrouvons tous au relais. Joseph a fermement décidé de s’entraîner à confectionner des relais sur coinceurs et Friends. Et il tiendra sa ligne de conduite pendant toute la voie, laissant soigneusement de côté les pitons voire points spités qui sont généralement présents à ces endroits clés de la voie. C’est au tour d’Adrien de se lancer à la découverte de l’itinéraire. Il va malencontreusement sortir légèrement de la voie et se retrouver dans un terrain non purgé. La sanction sera immédiate. Un ou deux cailloux de taille notable vont voler et venir s’ajouter aux petits cailloux ronds que Joseph fait involontairement rouler vers le bas par l’intermédiaire de la corde lors des mouvements d’assurage. Tout en criant « Attention cailloux ! », nous pensons immédiatement à Alika qui se trouve plus bas, n’a pas beaucoup de latitude pour bouger et se trouve dans le goulet réceptacle de tous ces éboulis. Elle nous fait savoir que cela devient dangereux et que nous devons redoubler de prudence. Le reste de la voie sera heureusement moins exposé. Nous progressons lentement mais sûrement, les deux cordées toujours en réversible, et nous finissons par arriver au pied du tunnel-cheminée qui nous a beaucoup intrigués à la lecture du topo. C’est Adrien qui a la primeur de se faufiler dans l’étroiture qui se termine en “boîte à lettres”. Ce passage est superbe ! On ne peut progresser qu’en l’absence de sac à dos, que l’on doit tracter derrière soi puis hisser hors de la boîte à lettre. Alika nous rejoint et nous prend en photo depuis le tunnel : ambiance garantie. 
Le relais de la boîte à lettres se trouve sous le départ de la fissure Ravanel. Nous avons deux options dixit le topo : « La faible cotation de la fissure Ravanel pourra surprendre ceux qui n'ont pas l'habitude de ce genre d'escalade. Une variante d'une longueur (bon 5b, avec de nombreux clous en place) permet d'éviter la fissure Ravanel (escalade en dalle, plus au standard contemporain !) ». Après une concertation rapide, Adrien et moi avons bien envie de tenter la fissure et de faire la voie authentique. Je pars voir de quoi il retourne. La fissure fait entre 30 et 60 cm de large selon les endroits. Il faut s’enfiler à l’intérieur pour placer des protections mais le sac coince rapidement et je m’empresse de ressortir pour progresser. Il y a deux ressauts consécutifs. Le premier est bref et le second plus continu. Comme l’escalade y est plus verticale, l’équipeur a eu la bonne idée de placer plusieurs pitons qui font gagner un temps précieux et éviter des blocages fatigants. Grâce à ces pitons, je peux rester en dehors de la fissure et profiter des petits gratons qui se trouvent à l’extérieur. Je me régale et suis très heureuse que nous ayons choisi cette option. Le relais de fin de longueur est confortable et offre une belle vue sur la vallée ; ce qui n’enlève rien à cette belle expérience. Adrien a commencé la voie en chaussures et n’a toujours pas mis ses chaussons. Ne pouvant valoriser les gratons externes, il fait de la “renfougne” à l’ancienne. Joseph ne le lâche pas d’une semelle et s’en sort comme un chef. Nous le félicitons en cœur. 
Le reste de la voie est nettement plus tranquille. Nous ajoutons un petit piment en négligeant un relai ; ce qui nous oblige à finir en corde tendue jusqu’au relai suivant. Nous arrivons plus tôt que nous ne le pensions au sommet et pouvons profiter du confort de pouvoir prendre le temps d’admirer la vue. Nous redescendons au refuge pour y manger notre pique-nique en terrasse, en l’accompagnant d’une boisson fraîche très appréciée car il fait très chaud. 
Le second groupe nous retrouve dans l’après-midi. Ils n’ont pas traîné vu la distance à parcourir. Chaque groupe fait son « debriefing » de la journée. Nous parlons des chutes de pierre. J’en profite aussi pour écouter les remarques et conseils de Benjamin sur la façon de progresser en mouvement en course d’arête. C’est ce que je pratique en situation d’encadrement, mais un peu moins dans le cas d’une sortie entre amis de niveau identique. Ces formations et recyclages sont toujours riches en enseignements. Nous avons de la chance que la FFCAM nous y donne accès et nous encourage à les suivre.

 







CLUB ALPIN FRANCAIS BELFORT

5 RUE DE LA MECHELLE
90000  BELFORT
Permanences :
jeudi 18:30-19:30
Activités du club