Carnet de route

Le Grand Paradis
Le 19/08/2023 par MAHUT Jean-Bernard
LE GRAND PARADIS – 19 & 20 août 2023
Samedi matin 3h30, le réveil sonne, je fais un bond. Café, tartine, toilette de chat et c'est parti pour aller récupérer mes 8 compagnons avec le minibus du CAF de Belfort. Rendez-vous à la douane de Delle à 5h. Tout le monde est présent et à l'heure. Ils doivent savoir que c'est un cheminot qui conduit et que l'heure c'est l'heure !
Quelques présentations pour celles et ceux qui ne se connaissent pas et c'est parti pour 5h de route jusqu'à Pont en Italie (cul de sac de la vallée d'où nous partirons pour rejoindre le refuge Victor Emmanuel II). Ça discute un peu mais très vite je n'entends plus rien. Tout le monde roupille.
11h. Il fait déjà chaud. Il ne nous faudra pas plus de 2h pour arriver au refuge. Petit casse-croûte. On largue quelques affaires dans notre dortoir, on s'équipe avec nos baudards et le matériel accroché dessus afin d'aller réviser les différents nœuds que nous devons connaître, ainsi que la technique du mouflage qui pourrait nous servir si l'un d'entre nous venait à tomber dans une crevasse. La pression monte dans nos esprits.
C'est Frédéric Martin dit "le Major", notre encadrant du week-end, assisté par Loïs et Romain qui se chargent de nous faire manipuler T-Block, poulies micro-traction, sangles, mousquetons... Tout le monde est prêt pour demain. Il ne reste plus qu'à passer à table et à aller au dodo car demain matin ça va encore piquer : réveil 3h30 - p'tit dèj à 4 et départ à 4h30. Mais on est à l'armée ou bien ?
Le réveil a un peu piqué mais quelle ambiance de partir de nuit avec ton sac, ton baudard et le cliquetis des mousquetons qui s'entrechoquent, ta lampe frontale qui crache son halo de lumière.
Il fait nuit noire. Tu suis le marcheur devant, regardes où tu dois poser tes pieds et tu ne te rends pas compte d'où tu es et de ce que tu pourrais voir. Tu n'aperçois que les petits points lumineux de ceux qui sont partis avant ou après nous du refuge.
Nous devions monter par la voie dite "normale", mais la bifurcation était très peu visible. Nous marchions un peu comme des robots derrière Fred, en pleine confiance et le hasard a bien fait les choses. Fred s'est vite rendu compte en mettant les pieds sur la crête de la moraine que nous étions sur une des variantes. Et c'est vraiment une chance, car nous n'aurions pas vécu ces moments inoubliables d'évoluer sur un vrai glacier où l'on peut sentir tous les dangers et voir cette beauté de la nature.
Puis, les premières lueurs du jour apparaissent et tu peux distinguer les montagnes aux alentours. De toutes beautés. Enfin, tu mets en pratique ce que tu as révisé la veille. Nœuds d'encordement, fixation des crampons et tu poses tes pieds sur le glacier du Laveciau.
Là, tu te dis : je suis un Alpiniste.
Franchissement de ponts de crevasses, tu peux regarder leur profondeur mais ça se perd dans le bleu qui devient de plus en plus intense vers le fond. Tu entends le crissement des crampons qui se piquent dans la glace, tu marches avec un piolet à la main, tu as tous les sommets environnants en vue en faisant un 360°. Vous l'aurez compris, c'est une chance de pouvoir vivre ça.
Nos 3 cordées se rejoignent à un replat à 3 739 m pour faire le point des troupes. Plus que 300 m de D+ à faire et nous serons aux côtés de la Madone. Le paysage est grandiose là-haut. On s'y attarde le temps de mitrailler avec nos smartphones. Un Suisse nous a gentiment pris en photo tous ensemble et puis c'est déjà la descente. On aurait bien aimé y casse-croûter mais y'a du monde. Il y a même un sens giratoire pour monter et descendre du sommet.
On est redescendu par la voie normale. Très chaud et très long là où il y a quelques décennies le glacier du Grands paradis se trouvait. Fred nous a montré par où nous étions passés le matin dans la nuit noire. Ce n’est pas si mal de n'avoir rien vu !!
Dimanche fut une très longue journée, nous avons fait 17 kms, 1 300 m de dénivelé positif et 2 000 m de négatif et il a fallu aussi rentrer sur Belfort. On a eu beaucoup de chance avec la météo.
Un grand merci à Fred qui consacre énormément de temps au CAF et merci aux 2 futurs encadrants !
--
JiBé