Carnet de route

Les expat' dans le Valais : 4jours, trois 4000m, D+5700m.

Le 08/05/2014 par Nika Pierre

Expatriés à Grenoble, on suit quand même les actualités du CAF Belfort à distance…faut dire il y a toujours des belles sorties au programme, surtout les raids de fin de saison. Cette année Nico et Anne-Cath avaient prévu un joli tour « tranquille » autour des 4000 du Valais mais leurs états de forme étant au plus bas, ils renoncent au projet. Quelle déception!

Alors avec Ludo on se dit…et si on y allait quand même ? Nous proposons d’emmener les participants inscrits, pas de réponse, tant pis pour eux. Au passage on recrute un Grelou (Guillaume) avec nous pour porter la corde et c’est parti !

Jeudi 8 Mai, direction: Täsch. (D+800m)

La voiture monte jusqu’à 1900m fin du déneigement. Dépôt du matos, piquenique face au Cervin et Guillaume se propose (enfin on lui propose…) de redescendre garer la caisse au parking de Täsch. En pleine forme de chômeur, il mettra 30 min pour remonter en courant (D+500m) ! La montée (D+800m) à Täschhütte passe bien sous le soleil, le Weisshorn dans notre dos, le Rimpfishhorn en ligne de mire. On mettra 2h et arrivera juste à l’heure pour la soupe. Après le repas, on se fait une partie au jeu des cabanes suisses, hyper sympa et bien dans le contexte ce jeu ! Puis dodo, enfin presque, il y a des ronfleurs...

Vendredi 9 Mai, Rimpfishhorn (arrêt à 4170m, D+1800m)

Réveil 5h. Ce matin, c’est un peu couvert mais les éclaircies sont annoncées. Il a neigé ces derniers jours, il faut tracer dans presque 20cm. Nous laisserons le soin aux lève-tôt de faire le travail et on les  rattrapera un peu avant le col sous le sommet d’hiver du Rimpfishhorn pour prendre le relais. Tout le monde s’arrête au sommet d’hiver, faut dire qu’il y a beaucoup de vent, nous on file à gauche pour aller voir la croix à 4190m. Il y a des traces dans le couloir d’accès…alors on les suit, elles débouchent à 4120m mais pas moyen d’aller à la croix sans prendre de risque. En plus la neige tient à peine sur les rochers, c’est pas très engageant. On pose un rappel sur béquet pour la partie haute du couloir et une fois en bas on s’aperçoit qu’on a loupé la bifurc’ à gauche pour sortir à la croix. De toute façon çà parait bien pourri. La descente de rêve vers l’Allalinpass dans de la poudre toute neuve à peine tracée nous consolera avant de retrouver le vent avec croûte puis soupe sur le glacier qui mène à Brittaniahütte.

Les 100m de remontée sous la cabane seront vite avalés et qui est-ce qu’on croise à la cabane ?…des CAFistes de Belfort : Michel Girard et sa troupe ! Toujours sympa de croiser des têtes connues à un refuge. Ce soir il y a du monde et en plus Astérix le moustachu nous a subtilisé le jeu des cabanes suisses… (il nous a vu y jouer la veille). Alors il y a plus qu’à aller se coucher après 1800m de déniv!

Samedi 10 Mai, Strahlhorn (4190m, D+1600m)

Réveil 5h. Une grosse journée nous attend puisqu’avec la remontée à l’Adlerpass, le sommet du Strahlhorn à 4190m puis la loooonngue traversée jusqu’à Monte Rosa hütte, on aura 19km à faire au total. Le lever de soleil embellit les sommets avec ses tons roses…çà claque ! Beaucoup de monde devant nous pour le Strahlhorn mais encore une fois, notre grande forme nous permet de remonter tous les groupes avant le sommet sauf les « collants-piplettes » du CAF d’Annecy qui viennent se dégourdir les jambes après la PDG. Pose photos sur l’arête au-dessus de l’impressionnante face N en glace puis casse-croute à l’Adlerpass avant de plonger vers le Findelgletscher où les crevasses sont bien visibles. Arrivés sur le plat, la corde est de rigueur et on se retrouve seul au monde : personne n’a tenté aujourd’hui la traversée vers Monte Rosa, heureusement la trace d’hier est encore visible. Peut-être aussi parce que la météo n’annonce pas un gros temps demain ?

Ça chauffe dans la remontée au Stockhornpass, il faut remonter 300m après les 1300 du Strahlhorn. Ludo mène la cordée et virage après virage on atteint le col. Heureusement qu’il y a plus qu’à se laisser glisser jusqu’au refuge…eh bien râté ! Il y a encore une dernière remontée avec corde fixe avant de basculer sur des échelles pour redescendre vers le refuge que l’on voit enfin. La vue sur le Mont Rose, les Liskamms, Castor, Pollux, Breithorn et Matterhorn est magique !

Au refuge, il est 15h, la table est déjà mise, et notre étiquette « Lacaille, 3 pers. » nous attend. Au passage merci Nico d’avoir réservé les refuges ! Réservations faites en Novembre c’est facile de nous trouver sur le cahier, on est en tête de liste !

Cette fois pas de jeu des cabanes suisses, il n’y en a pas, alors on va se faire une petite sieste dans notre dortoir grand luxe. L’intérieur bois avec gravures sur les poutres vaut le détour. Le repas passe toujours aussi bien (surtout pour Guillaume qui finit tous les plats !), le chef vient même en personne donner du rab (un peu épicé quand même le riz !). Il faut analyser en détail l’itinéraire du lendemain car il va falloir zigzaguer entre les crevasses et la météo s’annonce osée. Meteoblue donne un créneau entre 5 et 9h avec éclaircies puis un vent de 80km/h à partir de 11h avec gros nuages.

Dimanche 11 Mai, Dufourspitze (arrêt à 4356m, D+1500m)

Réveil 3h. On démarre à la frontale derrière un groupe mené par un guide et le duo de Parisiens qui a partagé le dortoir avec nous. Les couteaux sont de rigueur dans la pente au-dessus du refuge, au moins on ne les aura pas trainés pour rien !  Derrière le groupe, çà n’avance pas très vite et on se dit que si on ne veut pas louper le créneau, il ne faudrait pas traîner. Avec Guillaume on prend donc les rennes et on fait la trace. Un peu après le passage des séracs, on s’encorde avec Ludo qui nous a rejoint et on continue à tracer en contournant les crevasses. De là, on aperçoit la Dufourspitze (4634m) et le Sattel (4356m) sous l’arête finale. On commence même à croire qu’on va le sortir le sommet (même si personne n’y croyait au départ). J’avais bien la caisse ce jour, je continue de tracer jusqu’au col mais les conditions se dégradent plus vite que prévue. Le vent nous stoppe net parfois et la visibilité baisse vite. La rimaye passée, on s’arrêtera au Sattel, trop de vent et le brouillard est déjà là. Nous entamons la descente sans plus rien voir, on perd nos traces de montée…c’est la m…. ! Allez on s’encorde, il y a des crevasses là-dessous. A 2km/h Guillaume mène la cordée en essayant de s’orienter comme on peut, le brouillard disparaît de temps en temps juste pour nous permettre de tenir un cap. La grosse crevasse est passée et on retrouve nos traces, c’est bon on est sauvé ! La suite du retour vers le refuge n’est pas à garder dans les annales : c’est béton avec plein de vieilles traces gelées. Ca travaille la technique comme on dit ! On aura quand  même fait 1500m et prit un but 270m sous le sommet. Pas si mal et puis de temps en temps des conditions pourries çà rappelle que la montagne, c’est elle qui décide…

Le retour sur Zermatt se fera pas le Gornergletscher et les gorges du Gorner pour rejoindre la benne à Furi. Le passage des gorges, c’est un peu la roulette russe : ponts de neige au-dessus de l’eau qui ne demandent qu’à se rompre. C’était vraiment les derniers jours pour passer par là et éviter la remontée à la Gornergrat. A Furi, il reste 1h30 de marche pour rejoindre Zermatt, on craque et prend la benne qui nous pose dans la plus Suisse des stations Suisse où l’on passe un peu pour des malades dans les rues avec nos skis sur le dos et baudriers qui font Gling Gling au milieu des hordes de touristes indiens! Un train pour Täsch part dans 5 min, on embarque et boucle ce magnifique tour.

Ce fut donc 4 jours éprouvant mais dans un cadre tellement grandiose, au milieu des immenses glaciers, entourés par des grands noms, bien accompagnés, avec des bons sacs, de la poudre, de la croute, du béton, de la soupe, du soleil, du vent, la découverte du jeu des cabanes suisses mais on n’ oubliera pas le prix des bouteilles d’eau (11CHF/1.5L) ni la madone qui rationne les bols de thé du matin à Brittania !

En espérant donc que ce récit vous donnera envie d’y retourner,  nous en tout cas on reviendra finir l’arête de la Dufourspitze, peut-être après le Breithorn, le Castor et Pollux du raid de l’année prochaine ??

Pierre Nika / Ludovic Pesenti / Guillaume Desvignes

Les photos sur http://www.malicha.fr/photos/main.php?g2_itemId=38







CLUB ALPIN FRANCAIS BELFORT

5 RUE DE LA MECHELLE
90000  BELFORT
Permanences :
jeudi 18:30-19:30
Activités du club